DOSSIER

Les témoignages des attentats


En janvier et en novembre 2015, la France a été touchée par une série d'attaques terroristes meurtrières qui a entraîné de fortes mobilisations citoyennes et le dépôt, devant des lieux symboliques, de témoignages que certains services d'Archives ont collectés.

CLASSER


Le traitement documentaire des témoignages

Les choix de l'archiviste

Après les phases de restauration, conditionnement mais aussi de numérisation des témoignages (pièce à pièce et recto verso), a débuté leur traitement documentaire qui a fait surgir plusieurs questions, et exigé de faire des choix.

Le classement désigne la mise en ordre intellectuelle et physique des documents à l'intérieur des dossiers et des dossiers à l'intérieur d'un fonds (ensemble de documents réuni par une personne dans l'exercice de ses activités). Il aboutit à la constitution des articles, à leur cotation, rangement et conditionne la rédaction de l'instrument de recherche.

Les documents à classer. Photo Stéphanie Renard, ville de Toulouse, Archives municipales, 4num2.Archives ou documentation ?
Les archivistes ont d'abord été confrontés à la question de la nature des témoignages des attentats : sont-ils des archives (des exemplaires originaux) ou de la simple documentation (des copies) ? L'un des critères de sélection lors des collectes étant l'originalité des pièces, leur caractère unique, on peut parler d'archives à leur sujet.


Fonds ou documents isolés ?
Est-il légitime d'intégrer ces témoignages dans des « fonds » et de les traiter comme tels alors qu'ils proviennent de producteurs multiples ? Les archivistes ont répondu par la positive : ces productions individuelles résultant d'un geste collectif, d'une volonté commune de rendre hommage, elles ont donc été classées dans deux fonds, « Je suis Charlie (76Fi) » et « Fonds de témoignages sur les attentats du 13 novembre 2015 (79Fi) ».

Archives privées ou publiques ?

S'est ensuite posée la question de leur statut. Ces documents émanant de producteurs privés mais étant collectés à la demande du cabinet du Maire, doit-on les traiter comme des archives publiques ou privées ? Les considérant comme un don de la population à la mairie, les Archives municipales de Toulouse ont opté pour un classement en archives privées ; celles de Rennes ont opté pour un classement en archives publiques, ces fonds provenant de versements de la mairie.


Documents manuscrits, iconographiques, objets, ou les trois ?
Ces fonds regroupant des messages manuscrits très souvent illustrés de dessins ou de photographies mais également des objets, les archivistes ont décidé de traiter l'ensemble de ces témoignages hétéroclites comme des documents iconographiques. L'analyse des documents figurés est en effet plus détaillée, elle offre au public qui consulte ces fonds une description plus fine et précise.
 

Des fonds similaires et pourtant différents

 

« Je suis Charlie »


Réalisée à la pièce, l'analyse des documents a révélé des particularités de forme et de contenu pour chacun des deux fonds. Composé de nombreux dessins, « Je suis Charlie » est plus graphique, alors que le fonds du « 13 novembre » est essentiellement constitué de messages textuels.
 

« Pray for Paris »

 

De même, si la tonalité générale des documents est à l'union dans l'émotion, la condamnation des actes terroristes, le fonds « Je suis Charlie » est le reflet d'une société attaquée dans ses valeurs (liberté d'expression et de la presse, laïcité, démocratie... qui sont ici défendues). Le fonds du 13 novembre traduit quant à lui davantage la sidération d'un peuple touché dans son cœur, qui adresse ses prières et son soutien aux victimes, à leurs familles et aux Parisiens.